Lauréats... Ils se rappellent.

Denis Trossero (1989)

Denis Trossero, premier lauréat Varenne en 1989  avec Le Méridionnal pour « Voyage au centre des Beaumettes »

« Je garde de ce premier jour de remise des prix à Paris un souvenir extraordinaire. D’abord parce que c’était l’un des premiers prix de journalisme nationaux que j’obtenais, mais aussi parce qu’il venait saluer pour moi un reportage de fond que j’ai mené avec passion au coeur de la si secrète prison des Baumettes, l’embastilleuse en chef, la maison mère du crime à Marseille… Un reportage titré « Voyage au centre des Baumettes », qui était nourri d’angles différents et était accompagné de l’interview surprise d’un détenu accusé du pire des crimes sur une enfant de 7 ans, qui sera finalement acquitté aux assises. Je ne m’attendais évidemment pas à ce prix, tant les talents sont nombreux et souvent ignorés dans la presse quotidienne régionale de ces journalistes qui savent écrire. J’ai eu l’honneur ce jour-là de croiser la route du directeur de l’AFP de l’époque et d’un grand écrivain, mais aussi de goûter la présence gourmande de mon PDG de l’époque, Michel Bassi, le directeur du « Méridional », qui m’a très tôt fait confiance et m’a offert tout loisir d’écrire dans ma carrière. Je l’en remercie chaque jour. Je remercie aussi la Fondation Varenne d’avoir créé ce prix qui met à l’honneur chaque année des talents de journalistes aussi divers que variés. Je rêvais de faire ce métier depuis l’âge de neuf ans et j’ai pu mettre ma vie en adéquation avec mes envies, dans un travail de tous les jours qui n’en était pas tout à fait un: la quête de l’information et la passion de l’écrit.

Trente-six ans après mon entrée au journal, j’en reste passionné, même je viens de quitter il y a trois mois le quotidien « La Provence » pour exercer en freelance, travailler pour divers médias et écrire un livre sur l’univers qui a meublé mes jours et mes nuits pendant tant d’années: le monde judiciaire et policier.

« Un conseil aux jeunes journalistes : ne lâchez rien! passionnez-vous pour l’écrit…»

Si je devais donner un conseil aux jeunes journalistes et à ceux qui veulent faire ce métier, je dirais simplement: ne lâchez rien, passionnez-vous pour l’écrit, l’écrit n’est pas mort, il est encore le souffle et le rythme de la vie, même si internet gagne du terrain chaque jour. Et si vous avez cette envie folle chevillée au corps, ne vous en départissez pas. Vous serez le plus heureux des hommes. Le joli mot d’Albert Londres me revient sans cesse: « Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort. Il est de porter la plume dans la plaie ». Nous les journalistes, disait Joseph Kessel, « nous sommes des clochards qui dînons à la table des rois! » Quelle chance!

Je songe à ce propos à une anecdote vécue, un jour de procès fleuve, un grand avocat aixois me trouvant toujours aussi motivé qu’hier, en dépit des années écoulées. Je lui avais simplement répondu: « Oh, vous savez, je n’ai aucun mérite, cher maître! Je m’amuse toute la journée et je suis payé à la fin du mois. C’est quand même incroyable! »

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