Contact

Cérémonie de remise des Prix Varenne 2025

REMISE DES PRIX VARENNE 2025 –

 ©Photo Jean Louis Beltran, journaliste photographe fondation Varenne

©Prix Varenne : la presse locale à l’honneur

Quotidienne ou magazines, la presse locale a été particulièrement à l’honneur pour cette remise des prix 2025.

Journalistes de terrain, experts de la proximité, les lauréats de la PQR et des Magazines en régions se confient. Avec une certitude ; ils ont la passion de la locale chevillée au corps. C’est rassurant à l’heure où d’aucuns doutent de l’avenir de la presse écrite ainsi que de l’avenir de la presse dans les régions. Comme s’il était écrit que l’avenir est aux déserts de l’information. Et bien pour l’instant la preuve est faite d’une presse écrite qui résiste avec les déclarations enthousiastes et optimistes des lauréats 2025.

Quelques interviews de nos lauréat(e)s pendant cette soirée :

©Elsa Grenouillet, Monique Kéromnès, Marie Grenier et Simon Marseille.

Monique Kéromnès (grand prix PQR) : « L’IA n‘est pas prête à nous remplacer ! » 

« Sans eux, il n’y aurait plus de zone légumière en nord Finistère » : dans le Léon, des saisonniers étrangers devenus indispensables .”

C’était un cri du cœur, « je suis très fière » répond Monique lorsqu’on lui demande quel sentiment l’anime avec l’obtention de ce grand prix. Et le sujet pour lequel elle a été primée est une sorte de synthèse de son savoir-faire de localière au Télégramme de Brest. « Ce dossier dit-elle concentre tout ce que j’aime traiter en locale. C’est être à l’écoute. »

Ce fut un long travail, un reportage au long cours qui a demandé de revenir cent fois sur le métier d’autant que Monique Kéromnès n’était pas détachée sur ce sujet mais menait l’actualité du quotidien, ce qu’on désigne dans les locales par « l’agenda ». Un travail qui montre si besoin que les gens, quelle que soit leur place dans cette société rurale de la Bretagne, sont ravis de parler au journaliste qui vient les voir dans leurs champs. « Là, dit Monique, je dis que la PQR est dans sa mission. Parler des gens sans les stigmatiser. Alors lorsque vous allez ainsi vers les gens ils se confient. Même les travailleurs roumains, acteurs essentiels de ce reportage, ont parlé avec beaucoup de franchise. »

Journaliste au Télégramme, Monique Kéromnès ne changerait ce travail de localière dans le Léon, cette petite région du nord Bretagne, pour rien au monde. « Je crois à l’avenir de la PQR dans cette fonction-là, dit la journaliste. Et là, dans ce travail de reportage dans le rural, en prenant de la hauteur, en valorisant nos interlocuteurs, en décryptant cette société, je crois que nous sommes les plus forts et que l’IA n’est pas prête à nous remplacer. »

Simon Marseille (prix jeunes PQR) : « Un sujet de reportage repéré par des correspondants. »

« Je suis le dernier gardien de ce pays » : la vie d’ermite de Jean-Louis.

Prix jeunes dans la section PQR pour un reportage publié dans Le Dauphiné Libéré pour la rencontre dans un hameau de la montagne du dernier des vivants d’un village qui se dit « dernier gardien de ce pays ». Simon Marseille est naturellement, depuis ses études, un journaliste de radio. Et c’est un peu par hasard qu’il a fait une série de contrats vers la presse écrite dans la PQR, ainsi ce passage au Dauphiné qui le conduit sur les routes de la Thièves, petite région naturelle du département de l’Isère où la ruralité profonde n’est qu’un mauvais mot, mais pas la réalité.

Avec ce reportage on a la parfaite illustration du fonctionnement de la PQR. En effet, pour trouver le sujet de ce reportage la rédaction du Dauphiné a lancé un appel à ses correspondants leur demandant de repérer des êtres solitaires dans les villages de la montagne, mais ayant une belle histoire à raconter. « Lorsque je suis allé le voir, dit Simon Marseille, mon témoin, Jean-Louis, m’a dit qu’il n’aimait pas être mis en avant ». Finalement, de fil en aiguille, la conversation s’engagea et à l’arrivée cette rencontre fait l’objet d’une double page du journal et d’une belle annonce à la Une. Ce fut une belle surprise pour Jean-Louis qui est un lecteur quotidien du Dauphiné et à ce titre rien ne lui échappe dans les pages de son journal. « Ce qui m’a le plus surpris, commente Simon, c’est le nombre de réactions sympathiques que nous avons eu après ce reportage. Je crois que beaucoup de gens y ont retrouvé un peu d’eux-mêmes. Moi dont le grand-père était un alpin, qui avait cet esprit d’homme libre et bougon des montagnes, j’ai cru le retrouver dans le personnage de mon reportage. Et je pense que c’était la figure d’un aïeul pour beaucoup de lecteurs. »

Elsa Grenouillet (prix numérique en PQR) : « Ici la PQR est dans sa mission… »

« Lili Keller-Rosenberg, déportée enfant. »

Heureuse. Elsa Grenouillet voit dans le prix numérique de la PQR « un travail de longue haleine qui est valorisé. Et la personnalité extraordinaire de mon témoin donne une grande résonnance à ce prix. » Il est vrai qu’avec Lili Keller-Rosenberg, 93 ans, un des derniers témoins des camps de la mort, dernière rescapée de la Shoa encore vivante en Nord-Pas-de-Calais, c’est un exercice de devoir de mémoire qui est récompensé. Elsa Grenouillet a une conviction, un tel témoignage touche les jeunes et c’est bien la démarche de son journal, La Voix du Nord, ; qui a favorisé les temps de rencontre entre Lili Keller-Rosenberg et des collégiens. Il est vrai que son sujet numérique sert de support à ces rencontres et qu’il est projeté en classe.

En complément du traitement numérique récompensé par un prix Varenne, Elsa Grenouillet a produit un documentaire de 52 mn qui a été diffusé sur la chaine TV de La Voix du Nord et qui est aujourd’hui un outil pédagogique et un support important de témoignages à destination des collégiens et lycéens.

Journaliste à La Voix du Nord, très sensibilisée à l’image, Elsa Grenouillet a volontairement choisi cette approche numérique pour donner la parole. Un travail long pour un tel format qui n’a pu se faire que grâce à la confiance qu’elle trouve dans l’équipe de La Voix du Nord. A cet égard dit-elle « la PQR fait son travail, elle est le premier maillon de la chaîne de l’information, elle a un rôle moteur pour porter des voix, les collecter et les faire entendre. »

Marie Grenier (prix Magazines en régions) : « Je me bats pour l’avenir de Pyrénées magazine. »

« [Mixité] Parapente, Liberté pour tous ! »

C’est un peu par hasard que Marie Grenier, journaliste depuis une quinzaine d’années à Pyrénées Magazine tombe sur l’annonce du concours et qu’elle décide d’y participer. Finalement elle remporte le prix pour un beau reportage qui allie l’esthétique de la montagne et la mise en valeur d’un engagement au service du handicap.

Une école de parapente qui propose à tous, handicapés ou non, de s’initier au vol libre, ici au-dessus des pentes de la Cerdagne à l’est de la chaîne des Pyrénées. Marie Grenier a donné là un beau reportage avec les photos de Jonathan Cathala.

C’est aussi un bel encouragement pour Pyrénées Magazine, un trimestriel qui a plus de trente-sept ans d’existence et qui, il y a un peu plus d’un an, a été sauvé par son équipe qui a repris ce média à Milan-presse en créant une Société coopérative d’intérêt collectif. « On s’est donné trois ans pour réussir, explique Marie Grenier, et aujourd’hui je peux dire que nous sommes sur la bonne voie. » Pyrénées Magazine c’est non seulement un magazine sur l’environnement exceptionnel de nos montagnes du sud, mais c’est une approche de la société pyrénéenne, de sa culture, de son histoire et aussi de sa vie quotidienne.

©Bernard Stéphan, journaliste – conseiller de la Fondation Varenne


Lauréate du Grand prix radio – Sandrine Etoa-Andegue (41 ans)

FRANCE-INFO pour : « La part manquante »

« La radio c’est un métier solitaire alors avoir la reconnaissance de ses pairs, c’est important ». Sandrine Etoa-Andegue lauréate 2025 du Grand Prix radio avait déjà été distinguée par la Fondation Varenne en 2021. « La première fois je me suis dit que c’était un accident, cette fois je le prends comme une validation de mon travail de reporter ». La part manquante c’est l’histoire d’une rencontre entre deux sœurs jumelles de 36 ans, nées par PMA, et leur géniteur. « Le reportage s’est construit sur la longueur. J’ai suivi toutes les étapes de cette quête (rendue possible par la loi de bioéthique de 2021) auprès de Béatrice et Nathalie et elles m’ont fait confiance pour les accompagner lors de cette première rencontre. » La part manquante, un reportage inédit, qui révèle à nouveau l’immense talent de Sandrine Etoa-Andegue.

Lauréate du prix Jeune reporter radio – Hermine Le Clech (27 ans)

©Hermine LE CLECH

RTL pour :    « « Si je dis à mes copains que je n’ai pas de maison, ils vont se moquer » : rencontre avec ces enfants sans domicile. »

« C’est la première fois que j’ose candidater pour un prix ». Hermine Le Clech, lauréate 2025 du Prix jeune reporter, a cru à une blague quand le jury l’a appelée pour la féliciter.  Elle est « fière de ce reportage à hauteur d’enfant » qui nous emmène à la rencontre de Bursal, 6 ans et Asnat, 10 ans, deux fillettes Afghanes vivant à la rue avec leurs parents. « Elles sont venues vers moi, on a parlé de tout et de rien ». Avec beaucoup de finesse, Hermine Le Clech recueille la parole de ces petites filles, leurs ruses pour cacher à leurs copains qu’elles n’ont pas de maison. C’est ce talent, et cette sensibilité que le Prix du jeune reporter vient récompenser cette année.

©article d’Isabelle Poiraudeau – Présidente du jury RADIO


Lauréat du grand prix de la PHR – Pierre Schmidt (49 ans)

©Pierre SCHMIDT

du Journal LA RENAISSANCE LOCHOISE pour : « Parce Que Sandra Blanchet en a rêvé ».

“Fierté d’avoir été distingué pour ce Prix, et satisfaction que la Fondation Varenne ne fasse pas de distinction entre les différentes formes de presse. Mon article reflète ce que l’on fait habituellement dans la recherche de sujets de terrain. En l’occurrence cette jeune femme qui a repris un café restaurant et lui a donné une nouvelle vie”.

Lauréat du prix du jeune journaliste PHR – Tristan Derreudre (26 ans)

©Tristan DERREUDRE

du Journal FRANCE GUYANE pour : « Plongée derrière les murs d’une prison surpeuplée ».

“Beaucoup de fierté et d’émotion pour cette récompense. Je suis content que le sujet sur une prison en Guyane ait retenu l’attention du jury de la Fondation. Fier et satisfait aussi que le travail d’information dans les DOM, un peu délaissé dans l’actualité nationale, soit distingué à travers un organe de presse de la Guyane”.

©article de Dominique Valès – Président du jury PHR


Prix du jeune journaliste de la Presse Magazine – Louane Velten “La vie oubliée : premier récit de notre expérience prénatale” Magazine Epsilloon

©Louane VELTEN

« La vie oubliée : premier récit de notre expérience prénatale »


Le thème de votre article est original ? “Dans le cadre d’un hors-série sur le thème de la vie, la rédaction en chef d’Epsiloon, m’a demandé d’aborder une vie qui n’est pas encore née avec déjà son expérience sensorielle et cognitive. On y découvre la très grande importance de ce qui passe dans le corps de la mère, ce que le foetus peut entendre, ce qu’il retient du son qui traverse le corps maternel”


Vous débutez votre carrière ? “Diplômée depuis octobre de Lille, je ne fais pour le moment que du magazine en alternance chez Epsilloon, en radio et à RFI. Je suis en début de carrière, ce métier n’est pas facile mais il me passionne. Pour faire le journalisme qu’on aime, il faut de la stabilité. En recevant le Prix Varenne, je suis très contente de représenter la presse scientifique. C’est bien de faire de bons articles avec des sujets scientifiques et de pouvoir rendre compréhensibles et intéressants aux lecteurs des sujets parfois compliqués “.

Grand Prix Presse magazine nationale ex-aequo décerné à Martin Fort et Lucas Duvernet-Coppola pour “L’étrange cas du docteur Péchier” Magazine Society

©Martin FORT
©Lucas DUVERNET-COPPOLA

« L’étrange cas du Docteur Péchier »


Pourquoi ce sujet ?

Martin Fort : ” J’avais travaillé pour France 3 Besançon où l’affaire était déjà énorme même si elle manquait de retentissement national malgré trente empoisonnements. Je me suis penché dessus et en septembre 2024, comme je suis pigiste, j’ai proposé le sujet à Society”. Lucas Duvernet-Coppola : “Je suis salarié au Groupe So Press et l’affaire était dans les têtes. Suite à la proposition de Martin, on m’a proposé de travailler avec lui. On s’est rencontré en novembre , neuf mois avant la parution. On a échangé sur le sujet, on s’est réparti le travail, la lecture des documents, les sources, les témoins….” Martin Fort : “A deux, c’est la possibilité de parler de quelque chose que l’on connait. Nous nous sommes rendus sur place mais séparément et nous avons entendu des témoins à Paris. Ce ne fut pas simple, certains voulaient garder leur témoignage pour le procès. “. Lucas Duvernet-Coppola : “En racontant les faits, nous voulions raconter le monde des cliniques privées de province et cerner au plus près la psychologie du docteur Péchier.”.   Martin Fort : “Au fil des recherches, l’image de Péchier s’est dégradée avec par exemple des micros événements comme une tricherie au golf où il avait changé les cartes sans le reconnaitre pendant longtemps malgré l’évidence”.

Le travail d’écriture a été long ?

Lucas Duvernet-Coppola : “Nous avons mis un mois a écrire le texte (une vingtaine de pages). c’est un privilège que Society offre cette possibilité”. Martin Fort : “J’ai apprécié ce genre de format. Pour publier le papier avant le procès (il arrive au bout après des mois) il nous a fallu travailler crescendo et à plein temps à la fin”.

Le procès est -il conforme à votre enquête ?

Lucas Duvernet-Coppola : “Même s’il faut ne pas être présomptueux, nous avons retrouvé les grandes lignes de notre enquête dans le déroulé du procès. Il n’y a pas eu de mauvaise surprise. Notre texte a éclairé l’histoire”.  Martin Fort : “La longueur de l’article a permis de développer l’importance des faits avec trente empoisonnements et douze morts suspectes de 2008 à 2017. Avec Lucas, nous sommes très contents de recevoir le Prix Varenne et nous tenons a en remercier le jury”. 

Prix Presse magazine nationale : ex-aequo décerné à Clothilde Mraffko pour « La vie suspendue des Redwan » M. le Magazine du Monde

©Clothilde MRAFFKO

Pourquoi ce magazine sur la famille Redwan ?

Clothilde Mraffko : “On s’est posé la question au Monde après le 7 octobre, on voulait raconter les traumatismes des deux côtés. J’ai cherché une famille déjà exilée en 1948 après la Nakba. Après une première rencontre, j’ai revu les membres de la famille un an plus tard. Ils avaient été dispersés par l’exil. , une mère et une fille en Cisjordanie, une autre en Europe et le père qui était resté sur place. Actuellement le père est toujours à Gaza tandis que la mère et la fille sont en Espagne et l’autre fille en Grèce. Il est difficile de raconter les trajectoires des familles palestiniennes tant elles sont fracturées et les destins sont tellement différents entre les membres d’une même famille selon les événements et les circonstances de la vie. Ainsi, la mère qui accompagne la fille pour des études en Cisjordanie avant le 7 octobre, cela aurait pu être le père et la fragmentation qui s’ensuit pour des gens qui n’ont pas de papiers même chez eux et qui sont dépossédés de leur destin. 

Aujourd’hui, l’espoir de revenir est toujours présent chez les exilés même s’il n’est pas d’actualité et qu’il s’amenuise. La vie à Gaza est terrifiante car même l’argent envoyé par la famille depuis l’étranger ne sert à rien puisqu’il n’y a rien à acheter.  

Le Prix Varenne ?

Clothilde Mraffko : ” Cela fait deux ans que je travaille sur Gaza. Nos récits sont difficiles à incarner car nous ne pouvons pas nous rendre sur place. Je suis reconnaissante de savoir que les destins des Redwan ont intéressé les lecteurs et retenu l’attention du jury. C’est gratifiant. 

©article de Claude Lesme, journaliste – conseiller de la Fondation Varenne