Disparition de Christophe Deloire
13 | 06 | 2024
La Fondation Varenne perd un ami et un soutien.
Inlassablement, Christophe Deloire répondait aux sollicitations de la Fondation Varenne en s’engageant dans le soutien à nos activités au nom du journalisme, de la liberté de la presse et de l’éducation aux médias. Sa disparition nous plonge dans une infinie tristesse, tant cet ami de longue date incarnait, sans relâche, le combat et le dialogue pour que partout, ailleurs et ici, les droits des journalistes soient défendus et respectés.
De ses parents, instituteurs, à Molinet (Allier), Christophe avait hérité l’engagement pour les fondamentaux de la laïcité et les valeurs républicaines. Brillant élève au lycée de Digoin (Saône et Loire) puis au lycée du Parc à Lyon, diplômé d’HEC en 1994, Christophe découvre le journalisme lors de son service civil, au bureau de TF1 à Bonn (Allemagne). Après la rédaction de TF1 à Paris, c’est au Point qu’il s’initie au journalisme d’investigation en 1998. L’une de ses premières enquêtes au long cours, cosignée avec Christophe Dubois, consacrée à l’enquête policière relative à la cavale d’Yvan Colonna vaudra à ses auteurs le prix Louis Hachette (2003). Les livres suivants : « Les islamistes sont déjà là » (2004), « Sexus politicus » (2006) et « Cursus politicus» (2012) marquent son travail d’investigation tout comme « Matrice » en 2012.
Devenu directeur du centre de formation des journalistes (CFJ), il s’engage pour la transmission des fondamentaux de l’information et du journalisme avant d’être nommé secrétaire général de Reporters sans frontières (RSF) en 2012. Appelé pour redresser l’ONG précédemment dirigée par Robert Ménard, Christophe redouble d’activité au plan international, persuadé que nous sommes entrés dans l’ère de la manipulation. Son action au carrefour de la liberté d’expression et de la liberté de la presse conduite par un subtil dosage de fermeté et de dialogue avec les gouvernements et pouvoirs permettra de faire avancer de nombreuses causes et dossiers, de la libération d’Olivers Dubois otage au Mali au soutien à Julien Assange, ou à la mobilisation pour Mortazza Behboudi, otage en Afghanistan peu de temps après reçu le prix Varenne. Objectif permanent : le soutien à tous les journalistes emprisonnés ou menacés dans le monde. La Chine, l’Afrique, la Russie, le Proche et Moyen Orient, plus largement tous les régimes autoritaires mais également les états tentés par la restriction de certaines libertés d’informer constituaient son chantier quotidien lui qui ne déviait jamais d’une profonde indépendance.
Ne nous confiait-il pas récemment : « La liberté de la presse n’appartient à personne, ni à gauche ni à droite, ni au centre. Ce combat n’est pas celui d’un camp mais il appartient au bien commun ».
Ainsi a-t-il obtenu en février, gain de cause auprès du conseil d’état pour exiger de l’ARCOM une plus grande vigilance face à C News.
Tout au long de ces années, il a également apporté sa contribution dans les colonnes de La Montagne et des journaux du groupe Centre-France par des chroniques ou de pertinents éclairages valant mise en garde sur les dérives informationnelles de sociétés modernes telles qu’exprimées ces derniers mois au cours des Etats-Généraux de l’Information (EGI). C’est pour cette expérience que le président de la République l’avait désigné en juillet 2023, secrétaire général des EGI. Il avait sollicité notre Fondation pour nourrir des travaux qui dépassaient le seul journalisme en s’attachant à une réflexion globale de l’information et des attentes des citoyens.
Christophe ne sera pas là pour les conclusions le 26 juin, lui qui pendant les semaines de sa maladie fulgurante continuait d’accepter nos sollicitations pour venir par exemple remettre les prix « médias et ruralités » dans quelques jours. Sans doute une manière de cultiver l’espoir mais surtout une indéfectible volonté d’apporter son soutien à tous les défenseurs de la liberté d’expression et de la promotion d’un journalisme rigoureux.
A nos côtés avec un autre ami de la Fondation, Georges Malbrunot, Christophe relevait la force d’un certain journalisme des terres Bourbonnaises, manière de dire que les valeurs de notre profession se nourrissent de la force de nos convictions.
A ses parents, Marie-Annick et Lucien, à ses proches, à ses amis et collaborateurs de RSF, la Fondation Varenne par son président Jacques Mailhot et son conseiller spécial Philippe Page présentent ses condoléances attristées.
Jean-Yves VIF